« Ada - der intelligente Raum » - Universität und ETH Zürich an der Expo.02


		Avantages et limites
		Déclarations
			Rodney Douglas
			Paul Verschure
			François Höpflinger
			Rolf Pfeifer
			Peter Stamm
			Ray Kurzweil
		Impressions
		Concours

François Höpflinger, Sociologue

Le professeur François Höpflinger est titulaire de la chaire de sociologie à l’Université de Zurich. Il se consacre essentiellement à la sociologie de population, à la recherche sur la vieillesse, aux problèmes et aux relations de générations, à la sociologie familiale et à la politique sociale.
www.hoepflinger.com

Le texte suivant est une réflexion satyrique au sujet de «l’intelligence artificielle» écrit spécialement pour le projet d’exposition Expo.02.

L’intelligence artificielle en concurrence avec l’idiotie artificielle

L’intelligence artificielle, une idée très intéressante. Si cette entreprise réussit, la question que se posent depuis des siècles les astronomes Silicone extraterrestres de Cycnus 27 («Y a-t-il une vie intelligente sur cette planète bleue?») recevrait enfin une réponse positive. L’intelligence artificielle, basée sur des réseaux neuronaux, nous permet de résoudre des problèmes que nous n’aurions jamais eu besoin de résoudre sans intelligence.

Les possibilités d’application de machines et de locaux intelligents sont illimitées: qui ne serait pas enthousiasmé par une machine à laver qui en plus de laver bien proprement saurait également donner d’excellents conseils de mode ou même boursiers? Quel patient ne rêve pas de médicaments qui laissent tous les effets secondaires au médecin? Et qui ne serait pas intéressé par une maison intelligente qui non seulement résiste aux cambriolages mais qui en plus resocialise les cambrioleurs potentiels? L’intelligence artificielle, voilà l’avenir de l’homme! Mais comme l’homme est un être contradictoire, une intelligence accrue ne garantit pas forcément de mieux résoudre les problèmes. Trop d’intelligence concentrée dans un espace restreint peut créer des problèmes, comme le savent bien tous ceux qui ont déjà vécu des conférences d’enseignants ou de professeurs ou des débats parlementaires. Les êtres intelligents sont étonnamment empotés et peu réfléchis dans leur comportement collectif. L’intelligence artificielle peut intensifier le problème d’un surplus d’intelligence hyperactive et surmodulée.

Il paraît dès lors socialement nécessaire de développer en plus de l’intelligence artificielle (Artificial Intelligence) le modèle contraire de l’idiotie artificielle (Artificial Idiocy), selon le principe: la bêtise peut s’apprendre (et est volontiers copiée). Un ordinateur intelligent ou une maison superintelligente sapent la confiance en soi des personnes jeunes ou âgées d’intelligence moyenne. Un idiot artificiel par contre renforce l’assurance et la confiance en soi. Depuis des millénaires, une partenaire que l’on considère comme plus bête que soi a été une stratégie optimale appliquée par des hommes manquant d’assurance pour renforcer leur confiance en soi. Un cerveau artificiel qui fait autant d’erreurs que l’être humain peut contribuer à combattre des tendances dépressives.

L’intelligence artificielle et l’idiotie artificielle, voilà les deux piliers de notre avenir. Toutefois, on pourrait rétorquer, certes à juste titre, que notre société produit déjà suffisamment d’idiotie artificielle comme le montrent bon nombre d’émissions télévisées. Et, si on les examine avec soin, de nombreuses institutions de formation servent moins à favoriser l’intelligence qu’à canaliser le manque de connaissances et la prétention dans des voies socialement utiles. Les campagnes publicitaires ont souvent pour seul but d’amener des personnes intelligentes à faire d’agréables bêtises, etc.

L’intelligence artificielle et naturelle sont constamment en concurrence avec l’idiotie naturelle et artificielle, et en fin de compte c’est exactement cette ambivalence sociale qui rend la vie passionnante. L’expérience «Ada – l’espace intelligent» montrera si l’intelligence artificielle arrive à s’imposer dans cette sévère concurrence.